THESE DE DOCTORAT
Olivier Catel
Peinture et esthétique religieuse dans l'oeuvre de Chateaubriand
Directrice : Mme Laurence Richer (Paris XII)
Université Jean Moulin Lyon 3, Centre de littérature Jean Prévost
L'état des recherches actuelles sur l'auteur montre que les liens entre religion et esthétique, mais aussi entre esthétique et utilisation de la peinture, n'ont que très peu été traités, ou qu'incidemment, et que le champ d'investigation reste éminemment ouvert. Parler de peinture revient non seulement à s'intéresser aux sources d'inspiration possibles de l'auteur, -dans ce cas les sources iconographiques chrétiennes et spiritualistes-, mais aussi à la mise en oeuvre stylistique d'une technique picturale au coeur même de l'écriture. Cette thèse s'articule autour de trois axes principaux :
La première réflexion à mener est de type intertextuelle ou « trans-artistique »: il s'agit de mener une investigation précise des possibles tableaux, illustrations, gravures à caractère religieux qui ont construit ce qu'il convient de nommer la « pinacothèque imaginaire » de Chateaubriand. Cette recherche a pour intérêt non seulement de compléter des travaux antérieurs, comme ceux d'Alice Poirier, mais aussi de constituer l'imaginaire religieux de l'auteur, fondement créateur de son oeuvre : comment Chateaubriand transforme une vision de type pictural en description littéraire ? Cette mise en oeuvre de l'image dans le corps du texte revient à définir ce qu'est la description, l'ecphrasis chez Chateaubriand, ce que sont ces moments à valeur iconique qui se détachent de la pâte narrative. Reste à comprendre la place de ces icônes, profanes ou religieuses, dans l'oeuvre de l'auteur ; reste à montrer comment elles s'insèrent et prennent sens dans la lettre du texte.
La seconde piste de recherche concerne Chateaubriand peintre et créateur de compositions originales. Il semble alors possible d'aborder l'art de Chateaubriand sur un modèle pictural et de définir des grandes périodes artistiques qui correspondent, dans la vie de l'auteur, à des positions religieuses, métaphysiques et esthétiques. Le jeune philosophe rousseauiste des romans américains ne peint pas de la même façon ses paysages que l'homme plus mûr des Martyrs ou que l'homme âgé des Mémoires . Il existe un lien essentiel entre l'art pictural, les choix artistiques de Chateaubriand d'une part, et ses conceptions religieuses, métaphysiques et philosophiques d'autre part. La place qu'il donne au paysage l'inscrit dans la grande tradition de « coeli enarrant gloriam dei » que le Génie défend avec tant d'ardeur. Le paysage devient alors, semble-t-il, icône et passage vers le sacré.
La dernière piste de recherche concerne en particulier la philosophie esthétique de l'auteur, la place de l'image et de la peinture non seulement dans la société romantique mais aussi dans la littérature née du Génie . Il faut alors considérer la peinture d'un point de vue littéraire, philosophique et théologique pour se demander comment Chateaubriand construit une catégorie du sublime héritière des traditions du xvii e et du xviii e siècles mais aussi annonciatrice de la modernité. Comprendre le sublime religieux dans ses ouvrages permet de pénétrer le sens d'une esthétique et d'une vision du monde qui se sont développées pendant près de cinquante ans et qui n'ont cessé d'évoluer, entre tradition et rupture.